rosier gallique mis au commerce en 1845, par Louis van Houtte (Belgique). Non remontant.
L'apothéose de la rose ancienne et pourtant j'ai tardé à lui tirer le portrait. Je souhaitais la photographier sous toutes les coutures et bien sûr retracer au mieux son histoire, assez énigmatique.
Le maître du genre, François Joyaux, nous a déjà livré un essai de biographie mais il reste toujours des zones d'ombre.
Pour expliquer l'origine du nom de ce rosier, il est fait référence à un certain Mr Mills, un Anglais qui avait de superbes pergolas de roses et qui habitait à Rome dans les années 1840. Supputation, supputation ! Le nom de ce jardinier a pu être éventuellement honoré. On ne saura sans doute jamais.
Pour compliquer la situation, la bibliographie, depuis l'ouvrage de Charlotte Testu, s'évertue à assimiler Charles de Mills avec le très vieux gallique Bizarre Triomphant, figurant en 1790 au catalogue du pépiniériste parisien François.
Qu'on m'apporte la preuve de cette synonymie ! Elle semble découler des constatations du collectionneur Jules Gravereaux mais je n'en ai trouvé la trace nulle part !
Ni dans son fichier manuscrit, ni dans son inventaire de 1902, ni dans sa publication de 1912 sur les roses de Joséphine à la Malmaison... Quelle est donc la source qui mène à la résolution de ce mystère ?
En 1902, Gravereaux ne possédait ni Charles de Mills, ni Bizarre Triomphant... Les deux rosiers ne sont pas inscrits dans son catalogue. Seul Charles de Mills fera plus tard l'objet d'une fiche d'obtention. Il sera planté sous le n° 7325 (vers 1911-1912 ?) et sans mention de synonymie...
La seule certitude, en consultant la base de données HMF, est que notre Charles de Mills a été commercialisé, à partir de 1845, à Gand, par le belge Louis van Houtte. Ce célèbre horticulteur avait l'une des plus vastes pépinières généralistes européennes. Son catalogue de vente comptait des centaines de galliques. Mais il n'était pas lui-même hybrideur et obtenteur de rosier.
Charles de Mills apparaît dans les catalogues de 1845 et 1847. Il est classé en rosier de Provins (= gallique). Sa couleur est dite "carmin lilacé velouté".
Beaucoup de roses galliques, commercialisées par Van Houtte, sont d'origine inconnue et n'étaient vendues que par lui-même ou son confrère Verschaffelt. Où s'approvisionnait-il donc, hormis chez son ami obtenteur Louis Parmentier, à Enghien ?
Charles de Mills est-elle une nouvelle appellation pour un rosier ancien ? Van Houtte, habile commercial, voulait-il faire croire à une nouveauté ?
Toujours est-il que cet admirable rosier séduisit les Anglais et fut mis à l'honneur, un siècle plus tard, par la talentueuse Constance Spry. Son succès ne s'est jamais démenti depuis.
Un succès amplement justifié car il s'agit d'un arbuste parfaitement équilibré, bien buissonnant, au feuillage très sain. Ses roses, bien qu'inodores, sont tout bonnement parfaites. La forme, la couleur, ce petit côté zigzagant des innombrables pétales plissés.
Sur cette dernière photo, vous le voyez dans son jeune âge. Dans mon jardin, il a toujours conservé un port en boule, que j'accentuais par la coupe d'entretien, avec une hauteur d'1m10. C'est un gallique qui ne bronche pas devant une taille courte.
En conclusion, un fabuleux rosier, né de l'inconnu, mais dont je ne saurais me passer.
Sources :
LOISELEUR-DESLONCHAMPS, La rose, son histoire, sa culture, sa poésie, p.284-285, 1844
Jules GRAVEREAUX, Les roses cultivées à L'Hay en 1902
Jules GRAVEREAUX, La Malmaison, les roses de l'impératrice Joséphine, p.80, 1912
Constance SPRY, Garden Notebook, 1940
Charlotte TESTU, Les roses anciennes, p.37-38, 1984
François JOYAUX, La rose de France, p.72, 1998
Tu as raison Alix, c'est un fameux rosier. Je l'ai depuis longtemps, il n'est jamais monté au dessus d'un bon mètre de hauteur. Peut-être parce que je l'ai de bouture... par contre il marcotte facilement et peut faire des jets sur 1 m² sans souci.
RépondreSupprimerJe suis content que tu nous donne toutes ces informations parce que j'ai planté 'L'ardoisée' l'année dernière de chez Roses Loubert et il me semble bien que malgré une synonymie il s'agit de deux rosiers distincts. J'espère pouvoir effectuer la comparaison de visu ce printemps (pas gagné vu la pousse rachitique de l'an dernier avec la sècheresse estivale). En tout cas, je prends très bonne note.
Bonne soirée
Bises
Oui, L'Ardoisée et Charles de Mills sont 2 galliques différents.
SupprimerA mon avis, L'Ardoisée est le véritable Bizarre Triomphant. Cette synonymie a été clairement établie par Prévost, le plus grand et fiable rosomane du début XIXe. Son ouvrage de 1829 est une bible pour l'étude des roses anciennes.
J'ai hâte de voir la floraison de ton exemplaire !
Bises
Superbe ce rosier dont la couleur est si belle. Bravo pour tes recherches qui nous montrent à quel point ce rosier a su garder sa part de mystère.
RépondreSupprimerSes recherches m'ont donné du fil à retordre mais c'est toujours palpitant. Je suis sûre qu'il y a encore des archives à exploiter.
SupprimerA bientôt Lucile.
I love this rose. In fact I planted one "Charles de Mills" rose back in November, so I don´t expect flowers this year. Hopefuly next i will get some.
RépondreSupprimerI Love your Blog, Keep up with the great work!
Mon plus grand plaisir est d'être lue par des visiteurs étrangers.
SupprimerMerci James d'avoir laissé un petit mot.
Tu auras peut-être des fleurs cette année. Mon Charles de Mills a fleuri dès son premier printemps, seulement quelques mois après sa plantation. Mais le pied était greffé et déjà bien vigoureux.
Au plaisir de te lire à nouveau.
Compliments Alix, encore une fois super intéressante cette recherche que tu mènes à merveilles ! J'adore ce rosier, un must assurément.
RépondreSupprimerJe m'échine à lire des pages et des pages d'archives alors autant en faire profiter mes lecteurs !
SupprimerMerci pour ton gentil commentaire.
Bises.
Merci Alix, un reportage très intéressant sur un MAGNIFIQUE rosier, son coloris et sa fleur sont superbes !
RépondreSupprimerBonne journée
Oui, ce rosier est vraiment un must et ses fleurs sont assez grandes par rapport à celles d'autres galliques.
SupprimerA bientôt Jacqueline.
Super détective Alix a encore frappé !! mais du coup moi je ne sais plus qui j'ai au jardin car je pensais bien avoir identifié l'erreur de livraison de chez Guillot en reconnaissant le beau charles mais chez moi il me semble qu'il est beaucoup plus "bleuté" et qu'il finit par former de véritables pompons en fin de floraison ... le feuillage a l'air identique ... je vais certainement faire à nouveau appel à toi dès sa prochaine floraison et encore bravo pour tout ce travail de recherche qui me laisse pantoise d'admiration !!! bisesssssss
RépondreSupprimerLa couleur bleutée, c'est possible avec un sol à tendance acide. En revanche, les pompons, c'est louche ! Parce que là, la fleur est plate, pas du tout en coupe ou en boule. Tu attises ma curiosité, j'ai hâte de voir le printemps dans ton Jard'Ain !
SupprimerOn essayera de lui trouver un nom à cet inconnu.
Bises ;)
Bonjour Alix, je consulte souvent ton blog et l'apprécie bravo et merci pour toutes les informations que tu partages , je suis étonnée aujourd'hui que tu présentes les roses de Charles de Mills comme inodores je lis ailleurs " parfum envoutant " !
RépondreSupprimerBienvenue Claude, il ne faut pas hésiter à laisser un message et à donner son avis. Le partage va dans les 2 sens !
SupprimerAlors, pour le parfum, si tu lis "envoûtant", c'est un argument commercial fallacieux car le beau Charles n'est pas réputé pour des fragrances prononcées.
Les spécialistes jugent tout au plus son parfum "léger"...
Merci de ton passage.
Je confirme il a un parfum captivant. Rosier acheté chez Eve il y a 15 ans
SupprimerMais qu'il est beau! J'espère un jour le trouver dans une de mes jardineries fétiches ( je n'aime pas trop commander les végétaux,je préfère les voir pour faire mon choix) ce rosier est une merveille... Merci pour cet article très intéressant
RépondreSupprimerBonjour Stéphanie,
Supprimercomme c'est un rosier ancien non remontant, il y a malheureusement peu de chance que tu le trouves en jardinerie. Si tu le commandes à des rosiéristes sérieux (Loubert, André Eve...), tu auras un rosier qui reprendra sans problème.
Je suis comme toi, je n'aime pas acheter les végétaux (vivaces, bulbes) en VPC. Les rosiers sont une exception. C'est la seule façon d'avoir du choix et ils supportent parfaitement une plantation à racines nues. Il faut simplement s'adresser au bon fournisseur.
Hé bien , quelle histoire palpitante ! C'est pasionnant.J'adore quand tu racontes à la manière d'une énigme policière. Tu devrais écrire des romans dont les héroines seraient des roses. Sur certaines photos, on dirait des petits filaments blancs sur les pétales .Cela vient de la photo ou c'est naturel ? Elle me fait penser à une pivoine . J'adore ! Bon dimanche chère Alix
RépondreSupprimerEn fait, il n'y a pas de marbrures blanches. C'est un effet de la photo dû à la couleur plus clair au revers des pétales.
SupprimerBelle journée Maryse
Bonjour,
RépondreSupprimerMon rosier Charles de Mills acheté chez André Eve il y a 15 ans est merveilleux et je confirme qu'il a un parfum envoutant !! C'est une réussite pour mon jardin situé à 1300m d'altitude en Haute Savoie. dernier avantage il drageonne et fait de nombreux petits; bravo pour votre blog et les recherches historiques. Volette
Merci Violette. Je vais essayer de ressentir le parfum ce printemps. En 2017, Mon Charles de Mills n'a pas fait beaucoup de fleurs et elles ont grillé sous le soleil.
SupprimerBonjour Violette,
Supprimerje veux bien vous débarrasser d'un bébé rejet si jamais vous en avez un pour moi, je serai la plus heureuse !
Vous pouvez m'écrire sur kaari.haam@gmail.com