Célèbre pour son petit œil vert, clapi au creux de son coeur, Madame Hardy est la première rose du groupe des Damas, que j'ai plantée au jardin. J'en avais lu le plus grand bien dans les ouvrages d'amateurs avertis. Piquée par la curiosité, il fallait que je me fasse ma propre opinion.
Mme Hardy nous vient de Julien-Alexandre Hardy (1787-1876), qui fut, pendant 40 ans, le jardinier en chef du Jardin du Luxembourg, à Paris. Passionné d'arbres fruitiers mais aussi connaisseur de roses et obtenteur de nombreuses variétés (plus de 200), il développa une roseraie dans le parc du Sénat et lui donna une ampleur considérable au XIXème siècle. Dès 1813, fut récupérée la collection du premier grand rosomane français André Du Pont (1756-1817), le conseiller de l'impératrice Joséphine. Hardy la compléta avec les nouvelles obtentions et découvertes de l'époque. Grâce à lui, le Jardin du Luxembourg regroupa la plus importante collection de roses, faisant suite à celle de Malmaison, à l'abandon et précédant celle de Jules Gravereaux, à L'Haÿ-les-Roses. Le Jardin du Luxembourg, ouvert au public, comptait alors plus de 2700 rosiers, dont 650 galliques. Ce qui n'est plus le cas, aujourd'hui...
Palais (siège du Sénat) et Jardin du Luxembourg, Paris 6e, qui se visite toujours |
Dédicace à Félicité, l'épouse de l'obtenteur, la corolle de Mme Hardy est très belle assurément. En 1832, la Revue horticole la présente comme un hybride de Damas et de Portland. Les pétales arborent un blanc Chantilly, qui est à peine effleuré de rose, comme le sont souvent les roses blanches.
Le rosier forme un arbuste haut et dressé, mon exemplaire s'avoue même franchement raide. Ses branches se blottissent les unes contre les autres et malgré leur grandeur, leur robustesse me prive de toute tentative d'arcure ou de palissage. Les roses naissent ainsi au bout de longs rameaux.
Ce que je préfère en lui, ce sont ses charmants heaumes verts qui coiffent les boutons. Ces sépales ciselés et allongés sont la marque de fabrique des roses de Damas, tout comme les multiples aiguillons qui ponctuent les tiges.
Cette rose exquise est à réserver aux jardins ensoleillés car la belle se montre capricieuse. Elle a mis du temps avant de m'offrir une moisson de fleurs. Bien plus de temps qu'un rosier gallique. Il paraît qu'elle est très parfumée. Pas de chance non plus de ce côté là, je n'arrive pas à capter son odeur. Peut-être le printemps prochain...
Madame Hardy
Bibliographie :
Catalogue des rosiers cultivés au Jardin du Luxembourg, 1837, réédité et présenté par Vincent Derkenne en 2012 (Naturalia Publications)
Journal des roses, août 1880
François Joyaux, La Rose de France, 1998
Catalogue des rosiers cultivés au Jardin du Luxembourg, 1837, réédité et présenté par Vincent Derkenne en 2012 (Naturalia Publications)
Journal des roses, août 1880
François Joyaux, La Rose de France, 1998